Sébastien Calvet, le sélectionneur de l’équipe de France des moins de 20 ans le dit sans détour : « il faut rappeler à juste titre que les moins de 20 ans ont peu gagné le Tournoi des Six Nations. »
Trois victoires en tout, sur seize éditions. La dernière fois, c’était en 2018 et depuis, les Français ont toujours fini deuxième. Le dernier Grand Chelem remonte à 2014. C’était il y a dix ans, une éternité pour cette classe d’âge. A l’époque, Fabien Pelous était l’entraîneur d’un groupe dans lequel figuraient un certain nombre de futurs quinzistes internationaux tels que Arthur Iturria, Yacouba Camara, François Cros et Baptiste Serin, mais aussi les septistes mobilisés sur les Jeux olympiques de Paris 2024 Stephen Parez et Paulin Riva.
Pourtant, dans le même laps de temps, les Bleuets sont devenus trois fois champions du monde.
« Donc ça reste un vrai objectif pour nous de remporter cette compétition », insiste Sébastien Calvet sur les épaules duquel pèse l’impératif de briser ce plafond de verre, si possible cette année.
Faire tourner 45 joueurs sur trois blocs
Le staff français actuel estime avoir toutes les cartes en main pour réaliser ce que peu d’équipes ont réalisé avant. « Quand on parle avec nos collègues des autres nations, ils sont toujours épatés par le niveau individuel de nos joueurs. Il n’y a pas de grande équipe s'il n’y a pas de grands joueurs », rappelle Calvet comme une évidence. « La chance du rugby français ces dernières années, c'est une bonne combinaison et une bonne complémentarité de travail entre ce que font les clubs en termes de formation et la fédération ; une bonne collaboration pour faire vite progresser les joueurs et être vite performant à des âges où la maturité n’est pas encore là. Il n’y a qu'à voir la participation de nos champions encore éligibles en Top 14 et en Pro D 2. On a battu tous les records cette année. »
Sauf qu’il y a un revers à cette médaille. Avec des joueurs de cette qualité, non seulement les clubs peuvent rechigner à s’en séparer le temps du Tournoi, mais le XV de France aussi peut être intéressé par certaines pépites. Le dernier exemple en date est Louis Bielle-Biarrey, « piqué » aux U20 juste avant le championnat du monde pour qu’il performe à la Coupe du Monde de Rugby 2023. Et dans ce cas, les U20 arrivent en troisième position.
« Donc de fait, on doit travailler avec un groupe très élargi parce qu'on sait chaque année qu’au Tournoi des Six Nations on fait tourner toujours un minimum de 45 joueurs. Sur les trois blocs du Tournoi, 45 joueurs vont tourner et donc ça appelle à une certaine complexité », reconnait le coach qui est en poste depuis un an maintenant.
Un continuum d’une classe d’âge à une autre
Même si le groupe change logiquement en grande majorité chaque année, le système français fait que très vite les joueurs se fondent dans le moule du projet U20 après avoir été conditionnés depuis qu’ils évoluent chez les U16. Ainsi, l’objectif de remporter le Tournoi se transmet de génération en génération.
« Ce qui nous surprend positivement, c’est que le travail de notre transversalité paye. Les joueurs ont déjà les repères du projet de jeu. Notre discours passe très vite parce qu’ils ont été habitués par la filière de haut niveau, puisqu'on travaille aussi avec les académies Pôle Espoir. On constate agréablement un continuum, une vraie transversalité qui fait qu'on gagne du temps quand on les récupère », explique Sébastien Calvet.
Il ne fait aucun mystère que l’expérience est primordiale et que si une équipe ne gagne pas, elle apprend. C’est d’ailleurs ce qu’il veut retenir de la défaite 22-18 contre l’Italie lors du match de préparation du 6 janvier. Alors qu’ils menaient au score à la pause, les Bleuets se sont fait distancer avant de revenir à quatre points dans les arrêts de jeu. Un sursaut d’orgueil qui est venu un peu tard.
« Les Italiens ont répondu présent dans ce que l'on recherche : beaucoup d'engagement, forts en conquête, forts dans les zones de contact ; ils te pressent défensivement », reconnaît le coach qui se dit « toujours agréablement surpris de voir que nos homologues travaillent bien et sont en éternel progrès. C’est un plus pour nous, pour bien nous préparer. »
Peu de temps pour analyser l’adversaire
La difficulté de cette classe d’âge – « et c’est ce qui la rend passionnante », selon le coach – est de devoir très vite analyser l’adversaire pour mieux le contrer. Il n’y a pas de round d’observation, pas de passif qui compte.
« Les Irlandais, c'est vraiment la nation caractéristique, c'est à dire que quand on les rencontre en moins de 19 ans - sur ce qu'on appelle la tournée britannique que l'on fait chaque année avec eux - l'équipe qui se présente l'année d'après n'a plus du tout les mêmes caractéristiques. Elle est toujours nettement bien plus forte que ce qu'elle a présenté l’année d’avant », assure Sébastien Calvet.
« Cette année, je pense qu’on va garder ces nations fortes et peut-être un retour en force de l'Angleterre. On s'attend à des matchs difficiles en France contre l'Irlande et l'Angleterre. Et après, on sait très bien que les Écossais, les Gallois puis les Italiens, on l’a vu, peuvent présenter des équipes avec des générations fortes et nous surprendre aussi. Donc c'est toujours la découverte, le Tournoi des Six Nations.
« C'est en ça que notre catégorie d'âge est intéressante parce que le Six Nations est une découverte et on doit être performant dans la découverte. Il y a moins de surprises avec les équipes majeures. C'est une compétition qui est très importante à nos yeux et chaque nation veut gagner. Elle est très complexe et elle est passionnante à ce titre-là parce qu’il faut vite découvrir les nations, vite découvrir leurs valeurs, vite les deviner en peu de matchs à analyser et essayer de vite performer contre elles. »
Après un premier stage de préparation du 2 au 7 janvier, les U20 français en prévoient un second, cette fois en commun avec le XV de France dans la semaine précédant le premier choc prévu le 3 février contre l’Irlande à Aix-en-Provence.
Suivront un déplacement en Ecosse six jours tard, la réception de l’Italie le 23 février, un aller au Pays de Galles le 7 mars avant de recevoir l’Angleterre à Pau le 15 mars.