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LE SIX NATIONS U20 A FORGÉ LES BLEUETS POUR LE MONDIAL

maxence
Malgré des résultats décevants, l’équipe de France des moins de 20 ans considère son Tournoi des Six Nations U20 2024 comme essentiel avant le Championnat du Monde U20.

106 jours séparent les deux tournois majeurs des moins de 20 ans, soit trois mois et quatorze jours entre le match final du Tournoi des Six Nations U20 contre l’Angleterre (15 mai) et le match d’ouverture du Championnat du Monde des U20 contre l’Espagne (29 juin).

Une période au cours de laquelle joueurs et entraîneurs ont encore progressé entre échéances avec leurs clubs et rendez-vous avec la sélection nationale. « Ce n’est pas si difficile d’enchaîner sur les U20 parce que c’est une tout autre équipe, un tout autre projet », explique le trois-quarts centre de Brive (ProD2) Maxence Biasotto au lendemain de la défaite en barrage contre Béziers qui oblige son club à mettre un terme abrupt à une saison qui pourtant était très prometteuse.

Mais lui a de la chance. Car ce champion du monde des U20 en 2023 peut prolonger encore un peu la saison avec le Championnat du Monde en Afrique du Sud prévu du 29 juin au 19 juillet. « Ça change pas mal du club et c’est une aventure qu’on a très envie de faire en étant jeune. C’est facile de switcher, de se dire que la saison n’est pas finie pour certains et qu’il faut basculer avec les U20. Il nous reste encore des matchs à jouer. C’est mieux que s’il n’y en avait plus », admet-il.

Maxence fêtera ses 20 ans le 8 juillet, en plein mondial, à la veille du match contre le Pays de Galles, troisième et dernier rendez-vous de la Poule A avant d’envisager les phases finales.

Manque d’expérience collective

En se préparant à affronter les Gallois, chacun aura en tête l’écrasante victoire des Bleuets 45-12 du 7 mars à Cardiff. L’un des rares résultats positifs de ce Tournoi 2024 où les triple champions du monde en titre ont accusé trois défaites en cinq matchs.

« Même si les résultats ont été difficiles, ce n’est pas très inquiétant pour la suite parce qu’on sait qu’il y a une très bonne équipe, de très bons joueurs. On ne se fait pas de souci pour la suite, même si les résultats étaient plus compliqués », essaie de relativiser le Briviste.

« Ça a permis de remettre les pieds sur terre et d’oublier que la Coupe du Monde c’était l’an dernier », poursuit Sébastien Calvet, l’entraîneur de l’équipe de France des U20.

La difficulté de cette année – peut-être plus que les précédentes éditions – est que la France n’a que rarement joué avec son équipe-type, son « ossature ». La seule vraie opportunité était en fait contre l’Angleterre et la défaite 31-45 au Stade du Hameau à Pau.

« Sur le Tournoi, il y a eu énormément de rotations, plus de 50 joueurs ont joué et c’est vrai que ça a eu une influence. Les automatismes ne sont pas toujours les mêmes. C’est vrai que ça a été compliqué cette année », acquiesce Maxence qui a été libéré sans difficulté par son club chaque fois que le staff des Bleuets avait besoin.

« Malgré les résultats du Tournoi, cette équipe a monté en puissance, mais on n’a jamais pu aligner le meilleur de l’équipe avec une expérience collective nécessaire pour être en forme dans les moments les plus critiques », note Sébastien Calvet.

Victimes du succès

Pour expliquer que les rangs des U20 aient été tant déplumés au profit du XV de France et des clubs, il faut remonter à quelques années en arrière, lorsque la France a commencé son cycle de domination sur le monde en catégorie jeune.

En 2018, date du premier sacre, David Darricarrère, futur entraîneur des trois-quarts du CAB pour les deux prochaines saisons (le monde est tout petit), faisait partie du staff de Sébastien Piqueronies (aujourd’hui entraîneur de la Section Paloise). Dans le groupe de joueurs on notait la présence de Demba Bamba, Jean-Baptiste Gros, Cameron Woki et Romain Ntamack qui composent le XV de France aujourd’hui. Sans parler de ceux qui sont des pièces essentielles du Top 14 tels que Louis Carbonel ou Matthis Lebel s’il ne fallait en citer que deux.

L’année suivante, même chose avant que le Covid n’annule les deux éditions suivantes. Et en 2023, ce fut la révélation Posolo Tuilagi, Esteban Capilla, Mathis Castro-Frreira, Lenni Nouchi, Baptiste Jauneau, Hugo Reus, Paul Costes, Nicolas Depoortère, Mathis Ferté… Bref, encore plus de pépites.

« Les moins de 20 sont victimes du succès de leur formation française, mais on est heureux d’être victimes », résume en quelques mots Sébastien Calvet qui ne cache pas la difficulté de pouvoir aligner ses meilleurs éléments pour faire face aux grandes échéances comme sur le Tournoi 2024.

« Cette génération de joueurs nés en 2005 ne s’est pas sentie légitime au début du Tournoi. Ça prend toujours un temps pour qu’elle prenne la mesure que l’équipe de France U20 lui appartient aussi, autant que la génération née en 2004.

« On a senti que la génération prenait vraiment la pleine mesure de cette conscience - que cette équipe lui appartient aussi - face au Pays de Galles. On a ensuite fait appel à l’ossature pour le dernier match, mais celle-ci avait très peu d’expérience. On a juste passé quatre jours à préparer un match contre l’un des favoris de la Coupe du Monde cette année qui est l’Angleterre. Ça a été un match plein, d’une qualité assez référente sur ce type de confrontation. C’était un match utile. »

Le fort contingent de Brivistes

Dans cette ossature pour préparer le dernier match du Tournoi, quatre joueurs venaient de Brive, soit le plus gros contingent de joueurs avec le Stade Toulousain. Avec Geoffrey Malaterre (génération 2005), Léo Carbonneau et Mathis Ferté (tous deux champions du monde 2023), soit des U20 qui sont vite devenus des cadres de leur club cette saison, Maxence Biasotto était en terrain connu.

« C’est la réussite de la formation du club », assure-t-il. « Il y a une très bonne formation, les jeunes qui quittent l’école de rugby sont très bien encadrés, ils travaillent très bien. C’est tout ça qui fait qu’il y a beaucoup de joueurs de Brive qui arrivent chez les U20.

« Je ne dirais pas qu’on est un groupe à part ; on s’entend très bien avec tout le monde. Mais c’est vrai qu’on a des relations vraiment proches comme on a l’habitude de partir ensemble en déplacement en plus. On est tout le temps ensemble. »

Alors que le temps passe vite dans les catégories jeunes, qu’une génération chasse vite l’autre, chaque année le groupe remet l’ouvrage sur le métier et doit profiter de chaque instant en commun pour grandir pour tenter de conserver la couronne de champions du monde.

« Comme les coachs le répètent, un nouveau projet a démarré cette année et on ne parle plus de l’année dernière ; ça va être complètement différent cette année. On ne veut pas comparer cette année à l’année dernière », insiste le joueur. « Ça reste toujours un très beau statut à garder. Mais il faut aussi, surtout dans la période de préparation d’une autre Coupe du monde, ne pas repenser à ce statut mais repartir de zéro. »

La France outsider ?

Entre l’Angleterre favorite au Nord, la Nouvelle-Zélande championne du tout premier Rugby Championship U20 favorite au Sud, la France sait qu’elle part avec un autre statut cette année.

« On a perdu en expérience collective, tout en restant dans un projet fort », concède Sébastien Calvet. « Mais par contre, on a totalement conscience que le Rugby Championship a bien préparé l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Argentine et l’Afrique du Sud et qu’elles seront beaucoup plus préparées, plus averties ; elles vont nous attendre au tournant. On sait que ce deuxième match face aux Baby Blacks va être d’un tout autre acabit que celui de la saison passée. »

Ce deuxième match du Championnat du Monde, prévu le 4 juillet, Maxence l’a aussi en tête. « On sait que ça va être encore plus compliqué que l’année dernière parce que les Néo-Zélandais n’avaient pas de Championnat, ils avaient moins de matchs, comparé à nous, donc moins de préparation. On sait que cette année ce sera bien différent. Ça ne sera pas la même chanson », remarque-t-il.

En Géorgie pour travailler sur les zones de contact

Un groupe s’est retrouvé en Géorgie début mai pour un premier stage de préparation. « Le thème de la semaine c’était de se retrouver sur les contacts parce que la Géorgie est une équipe très costaud et on voulait travailler ça. Ça va me servir à la Coupe du Monde », confie le trois-quarts centre.

« Pour nous, c’est un stage relativement précieux parce que les Géorgiens te forcent à être bon sur les basiques, en particulier la conquête et l’efficacité en contact », confirme Calvet.

Le prochain rassemblement aura lieu le 17 juin au Centre National du Rugby (CNR) à Marcoussis où deux entraînements sont prévus avec le XV de France. « Par rapport à l’année dernière, on avait fait pareil : deux stages d’une semaine. Ça peut être bien, en plus avec le XV de France, qui est l’une des meilleures équipes mondiales. C’est toujours un privilège de s’entrainer avec eux et de prendre de leur expérience pour préparer notre Coupe du Monde. C’est vraiment très positif pour le groupe », se motive Maxence Biasotto qui se sent « très excité » à un mois du début du Championnat du Monde.

Il sait que, championne du monde ou pas, cette double génération – née en 2004 et 2005 – sera très scrutée aussi bien par les clubs que par le XV de France.

« Moi, le XV de France, c’est dans un coin de ma tête parce que c’est ce qu’il y a de plus beau à haut niveau. Pour ça, il y a encore énormément d’étapes et là j’essaie de me concentrer sur les U20 et le club qui est très important », nuance le Briviste.

Après une semaine de récupération, alors que d’autres seront en vacances, lui et ses partenaires lanceront la dernière ligne droite de leur saison. Avec un préparateur physique dédié, les Brivistes monteront progressivement en puissance, fiers d’avoir l’occasion de défendre leur statut.